LA GALERIE D'ART

Claude Jeanmart

Né en 1937 dans la région parisienne, Claude Jeanmart suit des études à Amiens puis à Paris, avant de s’installer à Toulouse où il enseigne les arts appliqués, notamment au lycée des Arènes et à l’Université Jean‑Jaurès.

Peintre et plasticien, il mêle depuis plusieurs décennies peinture, graphisme, numérique, vidéo, et s’intéresse tout particulièrement au corps – en mouvement, touché, célébré – ainsi qu’à la littérature comme source d’inspiration.

Le corps comme sujet et matière

La série intitulée Corps Aveugles est emblématique : il y explore la perception du corps via le toucher plutôt que la vue, suite à la rencontre avec une amie devenue aveugle et à ses lectures de Denis Diderot sur la cécité.
Ces gestes induisent des déformations, des oublis ou au contraire, des ajouts. Une façon d’échapper au savoir académique.
L’œuvre revendique ainsi le hasard, l’accident, le geste libre en situation de contrainte – une posture qui renouvelle sa maîtrise et la perception de l’anatomie, non plus explicite, mais ressentie.
L’artiste propose un renversement de la visibilité : « dessiner ce que l’on sent et non ce que l’on sait » pose la question de la représentation, de l’empreinte corporelle, du corps-image.
Par ailleurs, il invite à réfléchir à nos préjugés visuels, à la norme esthétique, à la relation entre regardeur et regardé.

Littérature et mythologie, sources d’inspiration intarissables

Lecteur passionné, Claude Jeanmart s’inspire autant des textes de Diderot, Kafka, Karel Čapek ou Gérard-Georges Lemaire que des grands mythes fondateurs. Ces références nourrissent sa réflexion sur la perception, la métamorphose et la relation entre le visible et l’invisible en y intégrant son processus si singulier de création “à l’aveugle”.

La mythologie traverse également son œuvre à travers des séries telles que Les Géantes, Les Atlantes ou Les Apsaras. Ces figures monumentales et archétypales célèbrent la puissance du corps et l’énergie vitale du mouvement. Elles incarnent, selon les mots de l’artiste, « une mémoire universelle du corps, à la fois individuelle et collective ». En convoquant ces présences intemporelles, il relie l’expérience intime du dessin à une dimension symbolique et archaïque : le corps devient territoire du mythe, surface où se rejouent les récits de l’humanité.

En conclusion, l’œuvre de Claude Jeanmart est à la fois radicale et sensuelle : radicale par sa remise en cause du regard et de la représentation, sensuelle par la matérialité du corps, du geste, de la surface. Elle nous invite à percevoir autrement : non plus ce que l’on voit, mais ce que l’on touche, ce que l’on ressent. C’est une œuvre qui interroge, surprend, et engage un dialogue riche entre le corps, la technique et le regard tout en s’interrogeant sur la nature humaine.